Aujourd'hui je me sens entre-deux.

Dans la demeure estivale agrandie, à la charnière entre des vacances pas très reposantes et un camp scout familial, je revois mon monde. 
Dans cette maison, où j'ai eu tant de bons souvenirs d'enfant, la seule en fin de compte où je ms suis toujours sentie bien, je mesure le fossé séparant le style de vie de mes parents et le mien.
Et pour une fois, je ne culpabilise pas d'être différente : je suis et c'est comme ça .

Curieusement, là, maintenant, tout de suite, je me sens adulte.

Je profite enfin aujourd'hui d'une journée seule chez moi, alors j'essaie de faire des trucs qui me plaisent, comme ce fameux gâteau au chocolat blanc et à la violette.
Curieusement, pour une fois , je n'ai pas trop improvisé, j'ai juste adapté la recette à ce qu'il  restait dans mon placard.
Je viens de le sortir du four et, ma foi, la fragrance est prometteuse...

Si je m'en sens le courage, je me fendrai d'une tarte aux rougets avec une pâte feuilletée maison. Pour la tarte, c'est sûr, pour la pâte, moins.

M'est venu une mini révélation d'ailleurs. A la base, la cuisine, c'est pas trop mon truc. Je suis plutôt du genre feignasse.
Je me suis vue contrainte de me mettre aux fourneaux, faute de moyens, et - ne le répétez pas trop fort - je me rends compte que j'aime ça !!! 

Je me sens comme une paralytique à qui, contre toute attente, on a donné un diagnostic favorable.
Je m'étais pour ainsi dire faite à l'idée de ne plus jamais remarcher, je m'étais installée dedans, et voilà que mes plans sont chamboulés. Pour le mieux, me direz-vous. Mais n'empêche, chamboulés quand même...

Il va falloir que je revoie mes cartes et que je me fasse à cette idée : le passé n'est plus, le futur m'attend.

Et je vais devoir réapprendre à marcher...
Arrêter de tempêter contre les coups du sort,  maudissant un destin sur lequel je n'avais jusque-là aucune prise et que j'avais en définitive choisi d'accepter...

Tant pis, je prend le risque de le dire : ne serait-ce que d'un point de vue logistique, ça me fait chier !
Pas tellement par ce que c'est une page qui se tourne et que beaucoup de choses sont en train de changer, mais par ce que j'ai oublié comment mettre un pied devant l'autre.

En même temps, paradoxe oblige, je suis très heureuse de cette nouvelle.

Et curieusement, je n'ai plus peur de tomber...

Se sentir forte et sûre de soi: un challenge

Idem + que cet état dure : une quête

L'inscrire dans sa personnalité : une course aux chimères, effrénée, épuisante, mais dont on ne se lasse jamais.
                                                                  l'odyssée de toute une vie, en somme

En fait, ça a un côté grisant, et apaisant en même temps, d'enfermer son stress et sa peur dans une bulle insonorisée et de la regarder s'éloigner au loin en disant "oui oui, c'est ça, cause toujours" Ou bien encore :"maintenant, ça suffit, c'est moi qui contrôle" .
Le pire, c'est qu'ils obéissent, la bulle s'en va, sans faire de vague.

J'en arriverai presque à croire qu'avec de l'entraînement, ça pourrait devenir naturel, de se sentir maître à bord de son propre corps.

Intéressant ...

Il paraît que je suis une inadaptée sociale dépourvue d'empathie, une autiste qui mord dès qu'on l'approche de trop près, ou dès qu'on essaie de lui voler son temps libre...
Il parait...

Mais j'aime les gens : leur compagnie, leur présence, leurs différence me sont autant de bouffées d'air frais

Il paraît aussi que je suis une handicapée de la décision et une poltronne finie dès qu'il faut mettre les belles théories en pratique...
Il paraît...

Comme si je n'osais pas laisser vivre celle que j'étais à l'intérieur

Et ça, j'ai envie que ça change...

J'ai envie d'un boulot, j'ai besoin d'un boulot.
J'ai besoin de voir autre chose que cette maison et son environnement immédiat
J'ai besoin que ma vie évolue, sérieusement.

On m'a dit un jour que je n'arrivais pas à effectuer la transition entre l'adolescente et la femme mature. Sur le coup, ça m'a déplu, mais j'y ai réfléchi longuement (et pour ce qui est de cogiter, je suis championne) et je dois reconnaître qu'il y a beaucoup de vrai.

C'est bizarre, je pensais qu'en ayant un enfant, ça se ferait tout seul. Mais non.
L'ado mal dans sa peau me colle comme de la superglu et j'ai vraiment envie de la laisser dans mon passé.
Dès que je dois agir, c'est comme si les mots s'emmêlaient dans ma bouche et dans ma tête, que les vieux complexes ressurgissaient. je me sens paralysée, empotée, persuadée que les gens vont se moquer de moi parce que j'aurai pris la mauvaise décision (ou par pure méchanceté) et que je me transformerai en vilain petit canard.
Alors je ne fais rien, j'angoisse à mort, et pour couronner le tout, je me met à bouffer.

Et il est temps que cela cesse.
Jeune fille de l'Age Blanc, ta période est révolue, tu peux reposer en paix dans les tréfonds de ma psyché. Ce n'est plus à toi d'occuper la vedette.
J'ai trop travaillé sur moi pour me laisser mettre des bâtons dans les roues par mes vieux démons.

Aujourd'hui, fille de l'Ajdren, je te libère.
Rentre chez toi, apaisée et heureuse, tu l'as bien mérité.

Aujourd'hui, femme-faucon, je te libère.
Eveille-toi à la vie et prend ton envol. Observe, fonce, traques et dépèce.
Tu as besoin de chasser pour vivre, c'est naturel et indispensable à ta survie.

N'aie pas honte de chasser.
N'aie pas honte d'être toi-même.

VIS !!!

Bon ben voilà, ça y est, les résultats sont tombés et le piti piafmouth  a réussi ses écrits et est admissible à son concours.
A vrai dire, je n'ai pas franchement sauté de joie quand je l'ai appris: j'étais heureuse bien sûr, surtout heureuse que tout les efforts fournis n'aient pas été vains, mais surtout deux fois plus anxieuse qu'avant...

Première pensée : Et merde!!! Va falloir que je sois au niveau en seulement un mois (oraux le 30 juin et 1er juillet)!
Par ce que s'ils ont jugé que j'avais un niveau suffisant pour passer la première barre, ça veut peut-être dire (quelque part, j'en sais rien moi, j'extrapole...) que j'ai une infime chance de passer la deuxième, voire de réussir.

Du coup, pour chasser ce méga-coup de stress, le piaf a appliqué sa méthode favorite de l'année : bosser, bosser et encore bosser...  Par ce que quand on bosse, on n'a pas le temps de penser, donc pas le temps de broyer du noir ni de stresser...

Le mode taupe est donc amorcé jusqu'au 1er juillet : adieu, vie sociale!!!

L'échéance se rapproche doucement, mais sûrement.
Plus que 2 jours maintenant. D'ici-là, je saurai si ça vaut la peine de m'accrocher pour mes oraux, ou si je vais devoir me trouver un boulot en septembre . Je saurai si je peux envoyer c*** la nana de l'ANPE par ce qu'il y a une infime chance pour que je n'ai plus besoin de ses services d'ici  mois, si je peux recommencer à faire des projets d'avenir, d'appart, de vie à 3, d'indépendance... ou si la chappe de plomb va se refermer sur mes doigts.

J'ai beau essayer de penser à autre chose, entre deux vagues de boulot, 3 fou-rires avec le chat et quelques câlins avec Monsieur Rat, je sens bien le nuage noir au-dessus de ma tête...

Alors je continue à bosser, coûte que coûte, par ce que de toute manière je n'ai rien d'autre à faire, en espérant comme une folle que cela serve à quelque chose; en croyant que j'aurai une chance de pouvoir présenter ces oraux, voire qui sait, peut-être même de les réussir malgré tous mes doutes

Et puis au moins, quand je bosse, je ne pense pas, donc je n'angoisse pas et ça, c'est vraiment reposant...

Fêlé le piaf ?
Je veux bien répondre à tous vos épithètes si vous m'accordez ce p****n de concours!

Bon, comme d'hab', ça fait un bail. Mais bon, j'ai jamais été quelqu' un d' ordonné, d'assidu ni de constant; donc ça me servirait à rien de faire semblant.

Mes écrits sont passés, première partie de mon concours, mais à vrai dire, ce n'est pas de cela que je souhaite parler aujourd'hui. Je commence doucement à entrevoir au fond de moi que, peut-être, j'ai en moi la capacité de réussir ces putains d'oraux. Pas par ce que tout le monde compte sur moi, ni parce que je n'ai que cette année pour y arriver, ni encore par ce que je me sens désespérée.
Non, rien de tout cela
Je commence à y croire parce que je me dis qu'après tout, ma prof a peut-être raison quand elle me dit que j'(ai en moi les capacités réelles de réussir de grandes choses, pour peu que j'accepte de foncer, de me lancer, de vire ma vie au lieu de la contempler, de la disséquer, de la rêver... Qui aurait cru que ce serait avec une prof de chant lyrique que je réussirai à défaire ces noeuds contractés si tôt dans mon enfance ,et à oser avancer, sans peur des autres et de leur putain de jugements à la con, sans peur de moi-même et de mes potentiels échecs, sans peur de la vie et de ce qu'elle me réserve d'imprévu et de potentiellement bon pour moi.

Oui, j'ai envie de me lancer
Oui, j'ai envie de commencer à vivre. A 27 ans, il est temps me direz-vous...
J'ai envie de me lancer, de partir à la conquête du monde, des autres, de cette partie de moi-même que je ne connais pas , et de me libérer de mes chaînes.

Ca fait trop longtemps que je me cache, derrière des attitudes poliçées, convenues, des silences gênés, des frustrations, et un autisme émotionnel latent. J'adore rêver, mais je me dis qu'après tout, créer, ça ne doit pas ête si mal que ça. Etre libre aussi, ça pourrait être un concept intéressant.

Reste à trouver les clés perdues depuis tant d'années, ou les laisser venir à moi, maintenant que je suis décidée et prête à ouvrir les portes...
Reste à réussir à me laisser aller. Il paraît que c'est moins contraignant que de résister...

J'ai besoin de changement.

J'ai besoin d'exister

J'ai besoin d'avancer.

Oui oui, ça va.

Enfin non, ça va pas. Mais bon, à force de culpabiliser par ce que ça ne va jamais, je finis par dire que ça va. Au moins, si je n'ai pas à rebrasser mon marasme quotidien, à retaillader ma plaie à vif, j'y pense moins, donc c'est un peu moins pire.

Qu'est-ce qui ne vas pas? (mode pitié on)
Plein de choses que personne d'autre que moi ne peux changer, à savoir pas de boulot, pas d'appart, pas de vie, pas de sous... Et un profond sentiment d'incertitude : une fois que j'aurai tout ça, est-ce que ça ira, enfin? Pourquoi suis-je infoutue de me satisfaire d'un état ou d'une situation. C'est pas possible d'être pessimiste et mal à l'aise de façon chronique comme ça. J'ai vraiment la sensation de me traîner un boulet à la patte qui se rappelle à mon bon souvenir dès que je réussis à l'oublier. Et à force de déployer les derniers ressorts de mon imagination pour le contrer, je finis par être à vcourt d'idées.

En plus, je commence à avoir le trac.
Il ne me reste plus que 5 malheureux petits jours avant ce putain de concours et c'est maintenant que le stress rejaillit et que la boule se forme dans mon estomac. Peu importe que j'ai bossé comme une folle pour y arriver, peu importe que tout le monde ait fait des concessions pour moi, et que tout (enfin une bonne partie) de mon futur dépend de ces trois petits jours, la peur reste.

Peur de rater? ...Pas vraiment.
Plutôt peur du blanc et du vide, de la nausée de la non-inspiration.
Envie d'être débarassée une fois pour toutes de ce ***** d'exam et de ce **** de statut d'étudiante qui m'empêche de m'affirmer en tant que femme, adulte et maîtresse de sa vie.
Peur aussi de moi-même. En effet, rien ne me dit que je ne vais pas inconsciemment le foirer, juste histoire de pouvoir passer à autre chose et de me chercher un vrai boulot. Comme ça, par pur sabotage, pour satisfaire ce slaud d'esprit d'indécision et de peur de l'avenir qui me pousse continuellement à me demander : mais, est-tu sûre que ce soit bien là ta voie? Est-ce que ça va te plaire? J'en sais rien, et je n'ai pas envie de répondre à cette question.
Tout ce que je vois, c'est que plus je révise, plus je stresse, et plus je deviens invivable. Mais tant que je resterai sans emploi, je resterai imbuvable, anxieuse, dépressive, etc...

Cela m'est égal, tant que cela reste agréable (principe Taoiste)

Enfin bref, passons à autre chose...

Le piaf a pris un aller-simple pour le pays des éléphants roses, et ça fait du bien.
Le piaf s'autorise enfin le droit de souffler, de ne penser à rien, de jouir du moment présent dans le calme et la quiétude, sans penser ni au précédent, ni au suivant.

En haut on a enfin trouvé le bouton off, et d'une main hésitante, apeurée, le piaf a appuyé dessus. Peur de l'inconnu, de se perdre encore, de se retrouver, de se découvrir aussi...

Une tasse de thé à la main, pour une fois je n'ai aucune pensée parasite, je suis, dans l'instant présent.
Je prends le temps de retourner chez moi, en moi, et de poser mes fardeaux.

Le piaf a dit au rat aussi qu'il devait faire un choix, et que le piaf ne voulait plus continuer comme ça, sur cette voie-là.
Le piaf a dit au rat qu'il ne voulait plus se battre que l'avenir s'était perdu dans la brume et que son existence -même était devenue chimérique. Le piaf a laissé le rat décider s'il voulait chasser les chimères ou pas.

Le piaf a dit stop.
Le piaf a souri intérieurement, soulagé de pouvoir mettre un terme à ces années de lassitude et de supplice nerveux.
Le piaf a fermé la porte sur lui-même, et trouvé que la solitude, le silence et la paix, c'était pas mal non plus; même plutôt agréable.

Le piaf doit se remettre à travailler, maintenant - bon petit soldat- mais en savourant chaque minute passée à engranger du savoir et des compétences, sans penser au but,ni au futur.

Le piaf expérimente ce que vivre un jour à la fois veut dire.

Le piaf avance, chargé de sa quintessence et avec pour seul bagage son oisillon. Qui l'aime le suive.